lundi 2 novembre 2009

Critique du culte de la gestion par les résultats

clé succès

C’est à la lecture de ce billet de Alain Patchong que m’est venu l’idée de renforcer le message de l’auteur en y mettant mon grain de sel, car je crois qu’il touche un point extrêmement important.

Avoir du succès c’est bien, savoir pourquoi on en a, c’est mieux!

Ou encore, j’aurais pu tout aussi bien vous dire que j’aime autant subir un échec en sachant exactement ce qu’il y a à faire pour corriger la situation que d’avoir du succès sans trop en connaître les raisons.

Pourquoi?

Parce qu’avoir du succès sans trop savoir pourquoi représente un danger. C’est un peu comme conduire une voiture sans connaître les différents contrôles du véhicule et/ou sans cours de conduite. Rien ne garanti que vous aurez un accident. Il est fort possible que vous puissiez vous rendre au café du coin sain et sauf. Allez-vous conclure pour autant que vous savez conduire? Vous savez fort bien que les risques d’accident sont très grands, que ce n’est qu’une question de temps…..avant que…..

Il est en de même en affaires. Lorsque vous questionnez les gens et les entreprises qui connaissent du succès, vous pouvez créer deux groupes distincts. Ceux qui savent conduire et ceux qui pensent savoir conduire.

Rares sont les gestionnaires qui vous diront qu’ils ne savent pas pourquoi ils connaissent du succès. Par contre, en les questionnant, vous pouvez facilement déterminer si les raisons invoquées sont solidement enracinées dans le réel ou s’ils relèvent plutôt de l’univers des suppositions et des hypothèses.

Les entreprises qui connaissent du succès et qui savent pourquoi sont très efficaces dans le contrôle de leurs processus. Ils connaissent les processus qui créent de la valeur dans leur modèle d’affaires ainsi que les extrants que doivent produire ces processus.

Dit autrement, le comment (processus) importe davantage sinon plus que le quoi (résultats).

C’est pourtant les résultats qui sont valorisés dans le monde des affaires. La gestion par les résultats a plusieurs adeptes. Qui sont-ils? Ce sont les gestionnaires qui vous laissent carte blanche en vous donnant le mandat d’obtenir des résultats tout en disant :

«Fais-le de la façon qu’il te plaira, l’important c’est que tu obtiennes X résultats.»

Si le gestionnaire fait de même avec l’ensemble de ses employés il aura, au sein de son entreprise – unité – service, autant de façons de faire qu’il y a d’employés. Dans ce cas, comment peut-il connaître les raisons pour lesquelles il a du succès? Autant chercher une aiguille dans une botte de foin.

Mais, à quoi bon s’en faire puisque les objectifs d’affaires sont atteints me direz-vous. Le jour où il y aura un échec, comment ferez-vous pour en déterminer les causes dans ce capharnaüm de pratiques hétéroclites?

Ce point est tellement important que Toyota utilise un système qui confirme la primauté des processus sur les résultats.

Voici un extrait tiré du billet : «Qu'est-ce qui est plus important: le processus ou le résultat?» qui démontre bien ce que j'avance en présentant un modèle utilisé dans un système éducatif aux États-Unis.

    • « Vous avez de bons résultats et vous avez suivi le processus alors c’est très bien et vous avez un A.
    • Vous n’avez pas de bons résultats et vous avez suivi le processus alors vous avez un B+. L’on considère que cet « échec » est une forme de variabilité (common cause variation) et qu’au prochain coup vous aurez de bons résultats : « the right process will produce the right results ».
    • Vous avez de bons résultats et mais vous n’avez pas suivi le processus alors vous avez un B-. De deux choses l’une : soit vous êtes quelqu’un de très chanceux ; soit vous êtes un génie qui a inventé une nouvelle méthode, meilleure que le processus standard. Dans notre exemple ci-dessus, vous êtes manifestement un gros veinard, pour être arrivé vivant.
    • Vous n’avez pas de bons résultats et vous n’avez pas suivi le processus alors vous avez un C. »

De votre coté, qu’est-ce qui vous importe le plus, le quoi ou le comment?

Source de l'image: chichacha

 

5 commentaires:

The Start-Up Coach a dit...

Une approche par résultats sans le leadership nécessaire pour l'encadrer c'est la recette pour un fouillis monumental. "Comment comptes-tu t'y prendre ?" est une question de base. Idéalement, elle se pose à l'intérieur de balises bien claires et définies.

Ensuite, pour que ça fonctionne, ça prends des résultats à court terme, pour pouvoir "ajuster" le tir en cours de route.

Pour reprendre ta métaphore de la voiture, le résultat c'est la destination. On peut aller à Québec en passant par la 20 ou la 40, dans les 2 cas, il y aura des étapes à suivre. ;-)

Mathieu Laferrière a dit...

Ton billet me rappelle un passage du dernier livre de Jim Collins - How the might fall.

Ceux qui privilégient les résultats ont du succès parce qu'ils sont bons et des échecs parce qu'ils sont malchanceux.

Ceux qui privilégient les processus et l'équipe ont du succès par chance et des échecs parce qu'ils doivent s'améliorer.

Je suis définitivement pour le deuxième. À partir de ça, ça fait un lien avec un vidéo que j'ai reçu via @adrienoleary sur le facteur chance ou comment faire pour la créer, de Philippe Gabilliet, Professeur ESCP Europe (youtube).

Karine Simard a dit...

Effectivement, il faut avoir un équilibre. J'ai lu dernièrement qu'une bonne planification avait une forte influence sur la chance :-)

Il reste que le chargé de projet ou le gestionnaire n'a pas un simple répartiteur de tâche. Son travail consiste à bien aiguiller son équipe.

Michael Glenn a dit...

Cela me rappelle un autre billet que tu as écrit récemment sur l'efficience. Est-ce efficient de développer un processus pour une activité qui obtient de bons résultats? Des fois, c'est peut être mieux de dire "if it's not broke, don't fix it!".

Unknown a dit...

@The Start-Up Coach:

Bonjour, bien heureux que vous veniez commenter ici.

Un excellent complément au billet. Je retiens les mots leadership, balises, claires et définies.

Des ingrédients que je considère, tout comme vous, essentiels.

Par contre, pour ma part, je suis bien prêt à débattre, en équipe, pendant des heures s'il le faut, pour voir si il serait préférable de prendre la 20 ou la 40. Mais une fois que l'on a pris une décision, on passe tous par le même chemin puisque c'est celui-là qui est optimal. ;)

C'est la cartographie du processus et le FAST qui détermineront les différentes étapes à suivre.

Salutations,

@Mathieu Laferrière:

Hello!

Merci beaucoup pour les infos supplémentaires.

Pertinent!

:)

@Karine Simard

Hahaha....un gestionnaire n'est surtout pas un répartiteur de tâche, il y a tellement de bons logiciels qui font ça. ;)

@Michael Glenn:

Salut Mike,

La clé de ton commentaire est le terme: «bons résultats». Qu'est-ce qu'un bon résultat? Dit autrement, peut-on considérer un bon résultat comme broken?

Ça me fait penser à un jeu de balle. Sans entrer dans les détails disons qu'une groupe de cinq personnes doivent développer un processus consistant à toucher à une balle selon certains critères, durant trois cycles et le plus rapidement possible.

Après plusieurs minutes de travail en équipe ils en arrive à une solution qu'ils considèrent excellente. Le temps requis pour réaliser les trois cycles est de 30 secondes.

C'est alors que l'animateur leur annonce qu'il est tout à fait possible de réaliser le tout en un temps de 15 secondes!!??

L'excellent résultat est ainsi devenu très.....déficient.

Donc:

1- Il faut se méfier des bons résultats....;)

2- Tu as raison de dire qu'il ne faut pas non plus passer trop de temps sur un processus qui génère le bon extrant et dont l'optimisation ne générerait pas une valeur ajoutée suffisante.

A+